4.5 Quelques distributions remarquables utiles
4.5.1 Notion d'impulsion de Dirac (numérique)
L'une des distributions les plus utiles est la distribution de Dirac.
On cherche à représenter une grandeur mesurable qui ne s'annule pas en dehors d'un point origine.
Pour cela, on envisage d'introduire une fonction numérique, non nulle seulement en un point pris pour origine.
Or l'intégrale de cette fonction est nulle.
On peut néanmoins l'approcher par une fonction paramétrée \(f_{\varepsilon}\):
- dont le support caractéristique est dans l'intervalle \(\left[-\varepsilon,+\varepsilon\right]\) entourant l'origine \(x=0\)
- normalisée à \(1\), \(\forall\varepsilon>0\):\[\int_{-\infty}^{+\infty}f_{\varepsilon}\left(x\right)dx=1\]
En faisant tendre \(\varepsilon\longrightarrow0^{+}\), \(f_{\varepsilon}\longrightarrow\delta\), appelée impulsion (numérique) normalisée (à \(1\)).
Les Physiciens définissaient l'impulsion de Dirac de la façon suivante:
\[\delta:\left\{ \begin{array}{lcc}+\infty & \textrm{si} & x=0\\0 & \textrm{si} & x\neq0\end{array}\right.\]
avec:
\[\int_{-\infty}^{+\infty}\delta\left(x\right)dx=1\]
Cette notation est toujours en vigueur, bien peu rigoureuse mais dont on comprend ce qu'elle signifie.
En général, elle suffit pour comprendre les résultats obtenus.
4.5.2 Définition sommaire
Laurent Schwarz a défini le concept de distribution.
On se limite à une dimension.
On appelle distribution une application linéaire:
\[T:\left\{ \begin{array}{l}\mathcal{D}\longrightarrow\mathbb{R}\\\varphi\longmapsto T\left(\varphi\right)=\left\langle T,\varphi\right\rangle \end{array}\right.\]
On ne rentrera pas dans les détails, en particulier sur l'espace \(\mathcal{D}\), appelé espace des fonctions d'essai.
En principe, on débute l'étude en prenant pour \(\mathcal{D}\) l'ensemble des fonctions \(C^{\infty}\left(\mathbb{R}\right)\) et s'annulant en dehors d'un intervalle compact (distributions à support compact).
- la distribution \(T_{f}\) associée à une fonction \(f\) est telle que:\[\left\langle T_{f},\varphi\right\rangle =\int_{-\infty}^{+\infty}f\left(x\right)\varphi\left(x\right)dx\]ce qui revient à pondérer \(f\) par la fonction d'essai \(\varphi\), qui est généralement plus régulière que \(f\).
- la distribution de Dirac \(\delta\) est alors définie par:\[\left\langle \delta,\varphi\right\rangle =\varphi\left(0\right)\]
Ces deux définitions sont compatibles avec l'approche qualitative précédente de la distribution de Dirac.
4.5.3 Peigne de Dirac
La distribution:
\[Ш:\left\{ \begin{array}{l}\mathcal{D}\longrightarrow\mathbb{R}\\\varphi\longmapstoШ\left(\varphi\right)=\left\langle Ш,\varphi\right\rangle \end{array}\right.\]
(lire «Sha») avec:
\[\left\langle Ш,\varphi\right\rangle =\sum_{n=-\infty}^{+\infty}\varphi\left(n\right)\]
est appelée peigne de Dirac.
On note usuellement:
\[\boxed{Ш\left(x\right)=\sum_{n=-\infty}^{+\infty}\delta\left(x-n\right)}\]
Cette distribution est conceptuellement utile: elle permet efficacement de se représenter une réseau infini de fentes d'Young, d'atomes dans un réseau, d'échantillonnages infinis.
Pour se ramener à un nombre fini, il suffit de la multiplier par une fonction numérique porte:
\[\Pi:\left\{ \begin{array}{lcc}1 & \textrm{si} & \left|x\right|\leq\frac{1}{2}\\0 & \textrm{si} & \left|x\right|>\frac{1}{2}\end{array}\right.\]
qui, à une translation et une dilatation près, n'en sélectionne qu'un sous-ensemble fini.
4.5.4 Dérivée (complément)
La théorie des distributions définit la distribution \(T^{\prime}\) dérivée de \(T\):\[T^{\prime}:\left\{ \begin{array}{l}\mathcal{D}\longrightarrow\mathbb{R}\\\varphi\longmapsto T^{\prime}\left(\varphi\right)=\left\langle T^{\prime},\varphi\right\rangle \end{array}\right.\]
avec:
\[\left\langle T^{\prime},\varphi\right\rangle =-\left\langle T,\varphi^{\prime}\right\rangle \]
où \(\varphi^{\prime}\) est la dérivée de \(\varphi\).
Ce qui est surprenant, c'est qu'une fonction restant finie mais discontinue en \(x=0\) par exemple admet une dérivée au sens des distributions, même en ce point.
En efffet, la dérivation usuelle est non ponctuelle et locale, alors que l'approche est assez différente en théorie des distributions.
4.5.5 Transformation de Fourier
On appelle \(\hat{T}=\mathcal{F}\left(T\right)\) la distribution transformée de Fourier de \(T\):\[\hat{T}:\left\{ \begin{array}{l}\mathcal{D}\longrightarrow\mathbb{R}\\\varphi\longmapsto\hat{T}\left(\varphi\right)=\left\langle \hat{T},\varphi\right\rangle \end{array}\right.\]
avec:
\[\left\langle \hat{T},\varphi\right\rangle =\left\langle T,\hat{\varphi}\right\rangle \]
où \(\hat{\varphi}=\mathcal{F}\left(\varphi\right)\) est la transformée de Fourier de \(\varphi\).
On retrouve un certain nombre de théorèmes puissants connus pour les fonctions et formellement transposables au sens des distributions.
Remarquons toutefois qu'une approche qualitative par fonction paramétrée permet le plus souvent de comprendre les résultats obtenus, mais le passage à la limite peut s'avérer très pénible.
Ainsi, on retouve facilement que:
\[\boxed{\left\{ \begin{array}{l}\mathcal{F}\left(\delta\right)=1\\\mathcal{F}\left(1\right)=\delta\end{array}\right.}\]
où \(1\) désigne la fonction constante égal à \(1\) (conforme au principe d'incertitude) mais beaucoup moins que le célèbre résultat:
\[\boxed{\mathcal{F}\left(Ш\right)=Ш}\]
qui permet immédiatement de comprendre la diffraction de Fraunhöffer opérée par un réseau de fentes d'Young ou de justifier si on le souhaite le théorème de Shannon.